
» Arrête de m’infantiliser à tout bout de champ garçon. J’ai plus 10 ans. Tu peux dire femme. »
« Mais c’est pas ce que…. »
» J’ai dis arrête, garçon. »
Je les appelle « garçon »
Comme ça, l’air de rien. Ca s’est installé doucement dans mon vocabulaire, et tout ceux avec qui je converse en français le sentent forcément passer à un moment ou à un autre. Au cours de la conversation, je dis « garçon ». Un tic de langage de répété ? Ou l’idée de rappeler à l’autre son âge et le genre auquel il s’est assigné. Je ne veux pas dire « mec ». Je veux dire « garçon ». Je veux rappeler que quelque part, on a encore le même âge. Qu’il n’y a pas si longtemps, on étaient ados, on étaient enfants. On étaient garçons et filles.
Je ne sais pas bien à quel moment les gens commencent à arrêter de dire « garçon ». On retrouve le mot, oublié, aux repas de familles quand les mamans s’empressent de rameuter le monde à la cantonade « Oh, où sont les garçons ? ». Ou le roucoulement des cercles proches, les glapissements entre copines, ces yeux qui se lèvent au ciel, qui disent « Alalala, les garçons ».
Mais dans la vraie vie, est-ce qu’on dit « garçon » ? Non. Est-ce qu’au bureau, dans l’environnement pro, ailleurs que dans une salle de sport ou à une table d’amis, on vous dira « garçon » ? Non. Prenez les filles. Tout le monde dit, écrit, pense spontanément « filles ». On est encore enfants aux yeux du monde. J’ai 20 ans. Je gagne ma vie. Je vie mes projets. Je fais tout ce qui me plaît. Et je suis encore une fille.
« C’est bien, tu dis garçon »
En soirée, en discutant empouvoirement, on m’a fait la remarque, un verre dans le nez. On m’a dit qu’il fallait continuer à se battre pour ses rêves, s’affirmer, aller plus loin. Et quand j’ai répondu « T’as raison garçon » on m’a ajouté « C’est bien, tu dis garçon ». Je pense que chaque chose à un nom. Quelque chose qui la qualifie. Une essence. Mettre un nom sur les choses, c’est les appréhender de façon plus tangibles, leur donner un sens, leur donner une existence. Si on me dit « fille », si on m’intègre dans un groupe de « filles », on me donne 10 ans. En fait. Si on y réfléchit. Et ce n’est pas juste que ce soit ancré dans notre vocabulaire à ce point. On est plus au collège où on se posait des questions sur nos jupes. On est des adultes aussi.
« C’est une fille comme ça », « c’est le genre de fille qui », « cette fille c’est »
Pourquoi, mais pourquoi on dit encore « fille » alors que la personne désignée a clairement la vingtaine passée ? Et non, je vous interdis de dire qu’on dit « gars » et que c’est pareil que « garçon ». Ce n’est pas pareil. Sinon, on dirait « nanas », on dirait « meufs », on dirait plein d’autres mots d’argot. « Fille » ce n’est pas de l’argot des familles. « Fille » c’est le bon mot, le langage courant, celui approuvé par le dictionnaire. Et on l’utilise à toutes les sauces.
J’ai pas de solution. Et je ne veux pas passer pour la personne agaçante qui pinaille sur des détails. Je soulève juste le sujet, comme ça.
Je trouve ton interrogation hyper intéressante ! Moi-même, j’ai mis du temps avant de me considérer légitime de m’auto-nommer « femme ». J’ai 26 ans, et je pense que j’ai arrêté de buter sur la dénomination définitivement, l’année dernière. Mais ça n’a pas été facile.
Je pense que je comprends ce que tu essayes de dire. Pour ma part, j’ai encore beaucoup de mal avec le mot « femme » aussi. Je ne sais pas trop à quel moment on « grandit assez » pour l’utiliser.
Une bonne question, que je ne m’étais jamais vraiment posée … Cela dit, aux yeux de la gent masculine, c’est plutôt positif. Mieux vaut faire partie des filles que des dames ! Il y a également l’appellation « jeune homme » que l’on peut se coltiner pas mal d’années, en tant qu’homme.
Tu n’imagines pas comme je suis heureuse d’avoir ton point de vue sur la question Simon ! Merci beaucoup pour ce commentaire. Je me demande comment est perçu le « jeune homme » du côté masculin ?
Je pense qu’à 20 ans, jeune femme est approprié… En fait, ce ne sont pas les mots pour désigner les filles, femmes etc… qu’il faudrait changer, mais plutôt utiliser des équivalent pour un garçon. Je ne comprends pas pourquoi moi on m’interpelle jeune fille, mais mon voisin de table jeune homme.
Oui, à mon âge je suis une jeune fille. Mais lui, à on âge, n’est pas un jeune homme. Alors pourquoi une telle différence ?
J’ai aussi du mal avec le mot femme. Jeune femme oui, mais femme … est-ce parce que dans mon insconcient, ça correspond à la mère ou l’épouse ?
Et LE truc qui ne passe pas, c’est le « Madame »… je comprends les revendications derrière l’abandon du Mademoiselle; mais franchement à 26 ans, le Madame je le vis pas bien ^^
Cela étant dit, c’est vrai qu’il est dommage qu’on ait pas plus d’équivalents masculins.