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Un accessoire, un maintien pour le dos, une fanfreluche aguicheuse, un ami qui vous veut du bien. Le soutien-gorge revêt tant de facettes et de personnalités qu’on ne sait parfois pas laquelle lui donner spontanément. Moi, j’ai arrêté depuis longtemps de me battre avec mon soutif, de me battre avec mes seins.

C’est le dernier billet de Sarah, ma copine blogueuse de chez Cueille le Jour qui m’a fait réfléchir à mes seins. Ils ont souvent été une très, très grande source de complexe. Pourtant, ils sont là.

 

J’ai arrêté de porter des soutiens-gorge depuis 5 ans. Ca n’a pas été facile.

Ado, je portais des brassières. Parce que tout le monde en avait. Et je ne voulais rien d’autre. Je me souviens qu’en rayon lingerie, une vendeuse avait dit à ma maman « Oh, ça lui passera. Bientôt elle vous réclamera des soutiens-gorge ! » et elles avaient gloussé de bon coeur. Le soutien-gorge, je voyais ça comme un vrai pallier, un passage à « l’âge adulte ». Ca faisait un peu « petite femme ». Ca m’inquiétait vraiment. J’ai été réglée très tôt, vers 9 ans et demi. Et je n’avais pas du tout envie de voir apparaître des seins. Je n’avais pas envie de les considérer comme quelque chose. Toute cette puberté, toute cette féminité, c’était trop d’un coup. Je n’y comprenais rien. J’avais envie qu’on me fiche la paix, moi et mes brassières d’enfants à l’effigie des aristochats. Du coup, le premier soutif est arrivé tard. Quand au collège, dans les vestiaires, toutes les copines portaient de la lingerie et que je me sentais encore plus en décalage. J’en ai eu un à mon anniversaire, pour mes 13 ans. Ca marquait vraiment le début de quelque chose.

Le choix du premier soutien-gorge, je pense que c’est un moment à part entière. On se rend en boutique de lingerie. C’est rose et ça sent le parfum. Les vendeuses sont affables. Elles vous dirigent vers les rayons « jeunes filles », sans trop de dentelles. Elles vous montrent des choses avec des baleines, des balconnets, des rembourrages. Et elles vous mettent entre les mains vos premiers modèles. Des bonnets A.

Mon bonnet A, je ne savais pas encore qu’il me suivrait toute ma vie.

Mes petits seins d’ado, on trouvait ça normal. Je me sentais normale. A moi aussi on pouvait me faire la remarque du « Oh la bretelle de ton soutif dépasse, attention ». Je n’avais plus honte d’enlever mon t-shirt dans les vestiaires. Doucement, mais sûrement, je commençais même à trouver ça sympa, un soutien-gorge. Désirable.

Sauf que. Les seins des autres poussaient. Et pas les miens. Les miens, ils restaient sagement là. Avec leur bonnet A. Et si à 13 ans, ça m’allait très bien. A 16 ans et les premiers garçons, mes petits seins m’inquiétaient. C’étaient les premières remarques dites du ton bon enfant dans la bande de copain. Celles qui blessent sans même s’en rendre compte.  » Ah non, moi j’ai des seins, pas comme Cléa »,  » Haha, non mais toi avec ta petite poitrine, tu peux pas comprendre »,

« Oh mais va-y, enlève ton t-shirt ici. Ca fait rien. Y a rien à regarder. »

Alors ça a été l’époque des rembourrages. Des soutiens-gorges 2.0 avec les petits bonnets en mousse intégrés à l’intérieur. Ceux qui font les seins bien bombés sans qu’on voit les tétons. Oh, bien sûre, j’étais frustrée. Frustrée de voir que ma petite soeur avait plusieurs bonnets de plus que moi, frustrée de savoir que je ne pouvais pas mettre de jolis décolletés pigeonnant.

Et les garçons sont cruels. Dans mon cas, l’éveil à la sexualité ressemblait à un jeu de jeunes chiots qui courraient dans l’herbe. Des images floues. Des « on dit que », des approximations. Il en faut, du temps, pour apprendre à se connaître et envisager ses désirs. Dans toute cette période de découverte, je me souviens de mots qui blessent. D’essais ratés. De piques cruelles.   » J’aimerai bien faire une branlette espagnole. Mais avec tes seins, on peut pas. »

J’avais l’impression que le fait d’avoir des petits seins me fermait tout un monde.

Celui des filles jolies, épanouies et désirables. J’en ai même pleuré, le jour où en entrant dans un magasin de lingerie pour acheter une nuisette avec un décolleté pigeonnant de « femme-fatale-comme-dans-les-films », la vendeuse m’a regardé de haut en bas avant de dire le ton dédaigneux. « Désolée. On fait pas de taille zéro ici. »

J’avais des petits seins et même les meilleurs soutien-gorge du monde n’y faisaient rien. En fin de journée, ils restaient comme ils étaient. Epinglés bonnet A.

Puis je suis allée vivre en Finlande en tant que jeune fille au pair. Pour la faire en brève, la vie de jeune fille au pair était une super expérience pourtant vraiment loin de vendre du rêve. Isolée dans un petit village, sous -30°C, à changer des couches toute la journée, mon bonnet A était clairement le cadet de mes soucis.

Puis j’ai rencontré ma première fille no-bras.

C’était une soirée smoothies et bricoles, dans un appartement de la banlieue d’Helsinki. Elle s’appelait Ilda. Elle avait des perles dans les cheveux. Un appartement minimaliste à l’extrême. Un hamac. Une table. Pas de frigo. Rien d’autre. Si ce n’est des plantes, des plantes partout qui grimpaient sur les murs dans une fantaisie étrange. Jungle urbaine sous la neige. On gravait des pièces en bois pour faire des colliers et on buvait des smoothies vegan. Je n’étais pas encore végétarienne. On était restée jusqu’à tard le soir, à se raconter nos déconvenues de jeunes filles au pair. Elles étaient toutes passées par là à un moment où à un autre.

 » C’est trop gênant quand un des petits te vomis dessus en public »

 » Non le pire, c’est quand ils te réveillent alors que c’est le matin de ton jour congé »

 » Ah non, le truc vraiment chiant, c’est quand ils demandent des trucs du genre « Papa, pourquoi elle porte pas de soutien-gorge ? » »

Et tout le monde avait rit. Et j’avais demandé : « Tu portes pas de soutiens ? ». Et elle avait répondu sur le ton de l’évidence.

« Bah non. T’as vu mes seins ? A part faire mal, ça sert à rien. »

Le soir j’étais rentrée toute pensive. Je m’étais regardé dans la glace. Et je m’étais demandé « Pourquoi pas. »

L’idéal avec la Finlande, c’est que je passais toutes mes journées en jogging à m’occuper d’enfants. Et qu’en sortant, avec le froid dehors, j’avais dix milles couches de pull. Personne ne regardait mes seins. Avec ou sans soutien-gorge. En fait, on s’en fichait. Alors, j’ai décidé que moi aussi, je m’en fichais.

Et ça a été une vraie révélation. Plus de pression à l’idée de plaire à tout prix. Mes seins n’étaient pas plus importants que mes genoux ou que mes oreilles. C’étaient juste des seins. Point.

Qui pointera du doigt la taille de vos chevilles ? La longueur de vos doigts ? La courbe de vos épaules ? Pourquoi diable fait-on tout un foin au sujet de la poitrine des femmes ? Cette idée de cacher-sans-trop-cacher-quand-même.

Ce fantasme du sein en forme de pomme sans téton.

J’ai appris à me détacher complètement du regard des autres. A me sentir plus libre. Plus fière. Plus enfant en même temps. Parce que je me suis aperçue que je n’avais jamais demandé à porter de soutien gorge. Que sans le regard des autres je n’en aurai probablement jamais mis. Essayer à tout prix de faire grandir mes seins n’était pas une chose qui me convenait. Je n’ai même pas besoin de porter un soutien-gorge. Il ne soutient littéralement rien du tout. Mes petits seins et moi pouvons faire du sport, courir ou sautiller sans gêne.

Sans soutien-gorge, je me suis questionnée sur beaucoup de sujets de conditionnements sociaux.

Le fait de garder ou non ses poils. Le fait de manger ou non de la viande. Sans le savoir, je faisais mes premiers pas vers des remises en questions générales. Et sur le regard que portaient les hommes sur mon corps. Je n’étais plus une vision conforme de jeune fille normale. J’étais enfant sauvage, mutine, sans soutien-gorge. Le no-bras a changé ma façon de draguer. Je me suis rendue compte que de l’autre côté de la barrière, la perception des seins était différente. Que je me faisais tout un foin sur « ce qu’ils pensaient » alors que je n’avais jamais essayé de chercher à savoir. J’ai un bonnet A, d’accord. Je ne vais pas le cacher. Je suis désirable, sans soutien-gorge.

En rentrant en France, je me souviens de l’une de mes premières réactions de ma mère sur le chemin de la boulangerie pour racheter mes premiers croissants. « Mais t’as pas de soutien-gorge ? Tout le monde va le voir ! Tu peux pas sortir comme ça. »

A commencé un long parcours du combattant pour faire valoir mon droit à garder mes seins comme je le voulais. Supporter le regard des autres sur le no-bras au boulot, assumer les tétons visibles, mais aussi réapprendre à ré-envisager ses seins et ne porter des soutiens-gorges que quand on a envie. Pas comme si on en avait besoin.

Et toi ? Tu en penses quoi du no-bras ? Tu le pratiques ? Tu connais des gens qui le pratique ?

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