Je ne sais pas bien pourquoi j’écris cet article, ni qui le lira. Il est 9h49. Je suis dans ma cuisine. En retard. Je devrai filer à la bibliothèque pour récupérer un bouquin puis passer à La Louve pour les courses de la semaine avant de rejoindre Delphine, la fondatrice de Narcissea pour un café avant mon cours de yoga. Pourtant, tu ressens parfois le besoin d’écrire. Dans l’oreille du vent peut-être. Mais écrire.

Tant pis pour la bibliothèque, le linge et les courses. Tant pis pour mon retard à vélo. Ca arrivera. Doux raton, j’ai envie de te parler du ramdam dans ma tête au sujet des deuils périnataux.

Un deuil périnatal c’est quoi ?

La mort d’un petit être. C’est une IVG, une IMG (interruption médicale de grossesse), une GEU (grossesse extra utérine), une ISG (fausse couche). C’est douloureux. PEU IMPORTE LA SITUATION DANS LAQUELLE ON SE TROUVE. C’est douloureux. Même si on a provoqué la fin de vie soi-même, un deuil reste un deuil et c’est normal.

Je suis pro-choix hein. Je suis heureuse que les IMG et les IVG existent. Mais je suis très très très agacée par le peu de place qu’on laisse dans l’espace public à ces deuils. Une tape sur l’épaule, un bon gros « Mais tu l’as voulu, non ? » et « Tu en feras un autre au bon moment ». Et c’est censé redémarrer.

Sauf que c’est pas un rhume ou l’appendicite. C’est un petit être qui est parti. Et ça a de l’impact.

Je ne fais que lire sur le deuil périnatal

Ca me fait à la fois beaucoup de bien et ça m’arrache des larmes. Vu de l’extérieur, c’est incompréhensible cette passion soudaine pour le deuil périnatal. Moi même, je n’y comprends rien. Je n’ai jamais perdu de petit. Je n’ai jamais été enceinte. Mais j’ai envie de tout fouiller, tout voir, tout entendre. Et la parole est là. Souvent douloureuse, mal recousue, à peine cicatrisée. Une plaie vive et lancinante que j’entends dans le coeur des femmes qui se confient. Une plaie à vif sur laquelle on aurait jeté une tasse de sel en attendant que ça passe.

Sauf que ça ne passe pas. Et c’est normal.

Si tu laisses tu te casses le bras et que tu ne fais rien, au bout d’un moment, ton os va finir par se ressouder de lui-même. Mal. Tordu. Douloureux. Mais il va se ressouder. Ce qui se passe dans ta tête est pareil. Ca va finir par guérir bon grès mal grès. Mais pas correctement. Et le souvenir sera aussi lancinant qu’une vieille blessure.

S’infliger de la douleur

Parce que socialement, le deuil fait peur et le deuil d’un bébé encore plus. Parce que dans le cas d’une interruption de grossesse, tu es censée être soulagée et ne pas te sentir coupable sinon bam les pro-vies te tomberont dessus. Parce qu’on a caché la mort. Et qu’on ne sait plus comment réagir face à elle.

Impression de creuser dans des dunes au désert

Tu creuses sous le sable. Et tu tombes sur des choses que tu ne comprends pas. Et tu te rends compte qu’il y en a partout. Partout. Partout. Il suffisait d’ouvrir une brèche pour que les mots s’y engouffrent, pour que les larmes se déversent. Je suis mille fois toujours émue par les histoires que je reçois, la confiance des témoignages qu’on me délivrent. Je me sens impuissante. Mais émue et j’ai envie de pouvoir tenir des mains et dire « Je jure que tu n’es pas seule ».

Du coup ?

Du coup du flou. Si je m’écoutais, j’écrirai davantage sur le deuil périnatal. J’irai interviewer des gens, je glânerai des conseils, je m’engagerai en asso. Je créerai des rituels et je m’échinerai à organiser des blessingways de deuil pour toutes celles qui le veulent. Si je m’écoutais, je deviendrai doula en deuil périnatal. Parce qu’il y a un trou béant dans la raquette.

Mais j’ai peur. Je me sens très jeune. Très bébé. Très illégitime. J’ai peur et je veux apprendre. Je veux comprendre. Je veux suivre mon intuition, partout, tout le temps. Même quand elle me trimballe dans des lieux que je ne comprends pas.

Les ressources de la semaine

Parce qu’une ressource ça se partage, voici les éléments qui m’ont marqué cette semaine sur le deuil périnatal :

Le récit Mon Avortement & Moi, de Rites de Femme.

A la fois très cru, honnête et touchant. Quand une féministe engagé sur la voie du féminin sacré te raconte qu’elle a dû avorter alors qu’elle était persuadée que ça ne lui arriverait jamais. Un texte émouvant et de magnifiques idées de rituels pour marquer ce moment en couple. La phrases suivantes me font encore vibrer le coeur d’émotion.

« Ils s’étaient enfermés dans les toilettes afin de se mettre nus, peau contre peau et d’accoucher l’embryon en faisant des position de yoga, d’accouchement naturel. Ils avaient trouvé choquante l’idée de jeter dans les toilettes ce qu’elle avait expulsé et avaient recueilli le sang et les cellules. Ils l’ont enterré près d’un dolmen, avec un petit mot, une bougie et un rosier. »

« Du coup, il a fait des kilomètres pour venir la voir, lui a offert des fleurs et (je trouve ça très beau), a embrassé son ventre en signe de bienvenu, de respect et d’acceptation de la situation et de la vie qui se manifeste, sans pour autant souhaiter le garder.  »

L’article Fausse Couche Avortements et médecine des plantes de Jardin Alchimique.

Un bel article très informatif et très sincère. Il explique concrètement que non, tu ne peux pas avorter avec des plantes à plus de 10 jours de grossesse. Mais que par contre, tout de suite après un rapport à risque, il y a des choses à faire. Cette herboriste belge prodigue des conseils d’une valeur précieuse.

Côté bouquins

Les livres Dans ces moments là, ma grande référence du moment en deuil périnatal et Vivre le deuil au jour le jour

Dans ma vie perso ?

J’ai toujours très peur de prendre des décisions. Mais je sens que des choses m’appellent qui me dépassent et qu’il suffit de suivre.

Je vais participer au stage de Danse contraceptive de Jessica Blum en Belgique, fondée sur la méthode d’Aviva Steiner qui me fait de l’oeil depuis bien longtemps. Et au séminaire Accompagner la vie en soi d’Isabelle Chalut qui vient en France cet été, la célèbre autrice de Rituels de femmes pour réenchanter la maternité, qui parle d’accompagner la vie comme accompagner la mort dans la vie.

A titre très personnel, je n’ai pas ovulé ce mois-ci. Ca m’a beaucoup bouleversé spirituellement, mais j’étais contente de comprendre mon corps. Je remercie tous les jours les méthodes de contraceptions naturelles qui nous permettent de vivre notre fertilité à deux en pleine conscience. Ici on arrête la symptothermie et on passe à sensiplan.

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